Quand la neige disparaît, les VTT roulent. Les stations redémarrent les télésièges pour que les VTT puissent dévaler les pistes. Mais derrière ces pistes se cachent des heures, des journées et des mois de travail. Les traces sont construites, préparées, réparées, signalées par des personnes dont le métier est "patrouilleur VTT" (ou "bike-patrol" pour les plus à la mode). Nous sommes allés à Châtel pour passer deux jours en compagnie de l'équipe des bike-patrols de la station pour en savoir un peu plus sur leur vie quotidienne.
Les patrouilleurs VTT ont plusieurs tâches essentielles à réaliser pour le bon fonctionnement du bike-park :
A Châtel l'équipe menée par Gary est composé de huit personnes à temps plein de mai à fin septembre. Certains, comme Foué, sont là depuis plus d'une décennie et connaissent le domaine comme leur poche, d'autres comme Yoan et Amaury font leur première saison dans l'équipe. Un savant mélange d'expérience et de sang-neuf s'opère.
En saison le rendez-vous et donné à 9 heures, soit 30 minutes avant l'ouverture du télésiège. Chaque jour un bike-patrol est désigné comme ouvreur et secouriste pour la journée. Les autres, en binôme, vont sur les pistes pour faire de l'entretien ou des réparations, armés d'une pelle, d'une houe, d'un râteau et d'une perçeuse/visseuse. Quand les machines (pelleteuses) sont disponibles et qu'il y a besoin de faire des gros travaux, le moteur tourne.
Le talkie-walkie accroché sur le sac à dos n'est jamais loin et si le responsable du secourisme a besoin d'aide, il appelle ses collègues. L'après-midi, vers 15h30, l'équipe du jour se retrouve au poste, enfile les casques, sort les vélos et part faire la fermeture du domaine. Ceci est très important, ils ferment la piste en mettant la banderole rouge au départ et parcourent les pistes une dernière fois pour vérifier qu'il n'y a pas une personne blessée qui a besoin d'assistance. Pour preuve, le jour où nous étions sur place, vers 16h, Amaury et Pierre ont porté assistance à un rider dont les deux poignets n'avaient pas apprécié le plongeon dans le pierrier de la piste noire Bike-Patrol. Au poste, un carnet d'ouverture et de fermeture des pistes est tenu de façon à répertorier les problèmes, les secours, les réparations...
L'équipe au complet travaille un mois en amont et un mois en aval pour le gros entretien (et la création) des pistes. Gary nous explique que la période cruciale est l'automne.
Il faut finir les tracés avant la neige et celle-ci permettra de tasser et stabiliser la terre. Au printemps on réajuste et on fignole. Avec la fonte de neige on peut aussi étudier les évacuations d'eau. - Gary
Huit paires de bras et autant de pelles, pioches, râteaux, c'est un véritable travail de fourmi à l'échelle du domaine qui compte 21 pistes. La pelleteuse tourne mais elle ne va pas partout. Elle ne représente que 35% des travaux. Inutile de vous préciser que dans les pistes noires (et pentues) de Châtel tout est fait à la main. Et manier la pioche quand les chevilles sont fléchies et tendues au maximum sur un terrain fuyant... ce n'est pas simple !
Cette année nous n'avons pas été aidé par la nature, un gros orage en début de saison a mis à mal plusieurs tracés et les travaux du télésiège ont recouvert la piste bleue People de débris de bois, donc c'est beaucoup de temps de perdu. Mais on devrait bientôt rouvrir la People, on va en profiter pour faire quelques modifications. - Foué
Quand on voit la taille de certains virages relevés on se demande bien comment, doté de sa petite pelle, le shappeur peut réussir à retoucher le tout ! Les break-bumps (trous et bosses engendrés par les freinages) sont souvent décriés par les utilisateurs. Un peu fatalistes, les bike-patrols nous expliquent qu'avec les passages (surtout juste après la Pass'Portes) c'est inévitable. Châtel est construit dans la pente donc, même certaines pistes bleues demandent d'être sur les freins. Mais à l'image de la Vink Line du bas (verte) quand le degré de pente correspond au niveau de la piste et que les chicanes viennent "casser la vitesse", les break-bumps sont moins problématiques. L'expérience engrangée au fur et à mesure des années est donc précieuse pour mieux comprendre comment le terrain réagit aux crampons des pneus de VTT.
Châtel ferme les pistes les plus vulnérables par temps de pluie. Cela engendre des frustrations de la part des utilisateurs, néanmoins Gary affirme que cela permet de préserver les pistes et d'éviter d'envoyer les riders au tapis inutilement. Au final les pistes noires sont un régal à rouler, quand elles sont ouvertes, avec un grip optimal pour attaquer les portions raides.
À une époque nous avions un trop gros "gap" entre les vertes, bleues et les noires franchement engagées. À nous d'être créatifs et de trouver des solutions pour bien accompagner les riders dans leur progression.
Travailler avec la pelleteuse c'est sympa, tu avances, mais c'est beaucoup de contraintes. Il faut de la place pour manoeuvrer. De plus la réflexion pour la création n'est pas la même que quand tu manies la pelle.
En haute saison les bike-patrols interviennent 3 à 4 fois par jour suite à des blessures. La plupart du temps l'évacuation se fait par voie terrestre. L'hélico intervient quand la piste est trop escarpée, que la personne ne peut pas se déplacer (ou ne peut pas être déplacée sans risque d'aggraver son cas), ou que le cas nécessite une urgence absolue.
Nous avons tous des formations de secouristes, c'est essentiel. L'apprentissage théorique est très dense et intense. Des fois on se demande comment on va tout retenir, mais quand tu es sur le terrain tout coule de source. Tu sais ce qu'il faut faire. Nous portons les premiers secours, organisons l'évacuation et surtout nous restons présents avec les personnes blessées et leur entourage pour les rassurer. Il y a un peu d'adrénaline qui sort quand nous sommes sur des cas plus graves. Il faut qu'on soit à 200% présent pour la personne. J'aime bien cet aspect très humain du métier. - Pierre
La station jouit d'une solide réputation (non volée) mais on lui a souvent reproché un côté trop "élite". Cela étant dit, certains "élites" reprochent le côté monsieur-tout-le-monde de certaines pistes. Vous comprenez à quel point il est difficile de contenter tout le monde quand l'équipe est composée de huit paires de bras ! Notez que Nico Vink a aussi apporté sa pierre à l'édifice avec la piste éponyme tracée à la machine. Aujourd’hui les élites pourront trouver leur compte sur les pistes noires (Chatel dispose de très belles traces naturelles taillées dans la pente à l’image de Cha-na-da ou Dré dans l’pentu et de la Air Voltage pour les vols long courrier). On trouve des jumps de toutes tailles et formes plus ou moins techniques, ils sont éparpillés partout sur le domaine : il faut explorer ! Les deux pistes vertes de la station sont vraiment bien faites (la Panoramic, qui porte bien son nom et la Vink Line "du bas") dans cette optique de contenter tout le monde.
Châtel n’est pas un bike-park où on vient pour une journée. Il faut rester 2-3 jours sur place, explorer, revenir... son style est particulier, il faut comprendre les pistes et ensuite les apprivoiser pour mieux les dompter et prendre du plaisir !
Franchement on n'a pas à se plaindre, nous aimons tous être dehors, nous avons l'occasion de rouler un petit peu - bien qu'on reste sages quand il s'agit des heures de bureau -, le contact avec les gens qui viennent rouler est top, on adore voir le sourire des gens, c'est la satisfaction du travail bien fait. Maintenant le plus dur c'est la météo. Quand il pleut c'est compliqué de shapper, la boue colle, les chenilles de la machine patinent. Nous faisons autre chose en attendant (signalétique, bois,...) et nous surveillons les évacuations d'eau pour éviter à tout prix les flaques stagnantes. - Foué (13 saisons sur le bike-park de Châtel)
Après y'a des fois où nous sommes impuissant face à la nature et nous ne pouvons pas non plus aller contre elle. Par exemple il y a des pistes qui nous posaient beaucoup trop de soucis (entretien, difficulté d'accès) qu'on a fermées. - Yoan (1ère saison)
Mine de rien faut être en forme pour ce métier, c'est assez physique ! Faut pas avoir peur de bosser sous la grosse pluie ou en plein cagnard. Faut aimer travailler avec la pelle et la pioche. Faut travailler en équipe et bien se tenir aux directives qu'on prend, si chacun y va de sa vision on aurait un bike-park hétérolicte et on perdrait notre énergie. - Gary (7 saisons sur le bike-park de Châtel)
Parmi les huit présents à Châtel, certains sont bike-patrols l'été et pisteurs secouristes l'hiver, d'autres ont des formations dans le bois (charpente surtout, utile pour les modules), ou encore ont forgé leur CV de shappeurs sur leur spot "privé" et d'autres en avaient marre de changer les plaquettes au shop... Il n'existe pas de profil type pour le moment car le métier n'est pas assez bien reconnu.
Notez que l'IFV (Institut de Formation du Vélo - à Voiron) propose depuis quelques années une formation "patrouilleur VTT", c'est une bonne porte d'entrée. Savoir conduire un engin de chantier peut s'avérer très utile aussi.
Ndlr : l'équipe de Châtel a déjà accueilli des stagiaires (à bon entendeur !).
Vous ne tombez pas mieux ! Il y a des forfaits à pourvoir dans le cadre de notre programme "j'irai rouler chez vous".
10 Commentaires
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La discussion continue aussi sur le forum avec le topic dédié aux bike-parks :
26in.fr
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Et franchement moi qui vient chaque été rouler sur Chatel, les pistes sont top, pour tous les niveaux...
Pour trouver mieux il y a Morzine mais sinon c'est dans le top 5 des stations de vtt en France...
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